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THAÏLANDE
RAID THAÏ - Muang Thaï (Le pays des hommes libres)
Chiang Mai
Pour la quatrième fois depuis 2008 je vais avoir la chance de guider dans le nord de la Thaïlande un petit groupe de 3 passionnés de moto tout-terrain.
Ron vient d'arriver tout droit de la côte Est des USA, bien fatigué après pas moins de 22 heures de voyage. Éric et Franck, qui se connaissent ont pris les mêmes vols que moi pour arriver jusqu'ici à Chiang Mai. Nous sommes nous aussi fatigués mais comme nous avons pu bénéficier de 3 places chacun sur le vol Doha (Qatar) / Chiang Mai, ça va.
Un taxi bien défraîchi nous a transbahutés jusqu'à notre hôtel, puis après une bonne douche nous sommes partis de bon matin - il n'est alors que 7h - dans les toutes petites rues encore peu animées du "coin" nord-est de la vieille ville de Chiang Mai, cernée d'un canal décrivant un carré parfait. Notre hôtel se trouve dans ce quartier. Il est donc aisé de s'y repérer, ou de s'y perdre sans crainte. Il suffit de ne pas traverser le canal et c'est tout.
Après un mauvais repas dans un restaurant chinois au sol glissant d'huile de friture, nous avons eu l'idée de nous rendre chez le loueur de nos motos pour vérifier qu'elles étaient correctement préparées. Heureusement que nous nous y sommes pris assez tôt car l'adresse de son établissement ayant changé, nous avons avec un peu de frayeur trouvé porte close à son ancienne adresse, sans qu'un écriteau ne renseigne sur ce déménagement.
Les motos sont bien là, conformes à nos attentes. C'est parfait. Nous reviendrons en fin de journée, équipés, pour les prendre en compte.
Demain c'est le grand jour, celui des premiers tours de roues sur la première étape.
En attendant, nous allons dîner au Rider's Corner Restaurant, un établissement bien connu des motards voyageurs.
Chiang Mai / Mae Chaem
Le chant du coq, le "gong" du temple d'à côté, le ronronnement du climatiseur auront eu raison de notre sommeil. À 4h30 ce matin, tous, nous étions réveillés, prêts à bondir sur nos motos.
Ce n'est qu'à 7h30 tout de même que nous nous rendons dans un hôtel tout proche du nôtre pour prendre un copieux petit-déjeuner.
8h30. Il est temps de prendre le départ de notre première étape.
Sortir de Chiang Mai n'est pas compliqué. Mais c'est long. La circulation est très dense sur le boulevard qui rejoint l'aéroport, vers le sud-ouest de la ville. Et malheureusement c'est l'axe que nous devons emprunter pour rejoindre notre première piste.
Après avoir parcouru environ 20 kilomètres, nous prenons à gauche notre premier chemin thaïlandais. Il est sec, recouvert de gros gravier et jonché de grandes feuilles mortes.
Très sinueux, il est parfois technique.
C'est volontairement que j'ai choisi de mener ma petite troupe sur cette piste. Comme lors de chacun de mes raids, je profite de ces premiers moments de roulage pour jauger le groupe, adapter ma vitesse de progression à celle du pilote le moins aguerri. Ainsi, je détermine avec une relative précision la distance qu'il nous sera possible d'envisager raisonnablement chaque jour.
Le groupe se comporte plutôt bien.
Après seulement quelques kilomètres, je stoppe la caravane. Je demande alors à chacun de noter, de 1 à 10 les difficultés rencontrées. Ron m'indique les avoir jugées à 7. Pour Éric, c'est 3 et pour Franck, 5. Du coup, Ron est tenté de descendre à 5 lui aussi.
Ces appréciations me seront utiles afin d'adapter mon circuit aux capacités d'engagement du groupe tout entier.
Reste à voir si, dans la durée, la fatigue se fera sentir...
Nous quittons cette première piste au bout de 15 kilomètres environ.
Un long bout de route goudronnée, très sinueuse et toute en montées et descentes permet à chacun de bien respirer et de se détendre les membres.
En milieu de matinée nous faisons une pause thé et café, suivie assez rapidement d'une pause déjeuner dans un restaurant familial que je connais bien.
Jusque là, tout va bien.
Une seconde section d'asphalte nous permet d'atteindre l'entrée d'une piste magnifique qui se déroule sur plus de 100 kilomètres.
La piste terreuse, assez large décrit d'innombrables woops dans une végétation luxuriante. Tantôt rouge, sombre et luisante - donc glissante - lorsqu'elle n'est pas directement exposée à la lumière du soleil, tantôt couleur crème et poussiéreuse, elle est empruntée par quelques pick-ups chargés de choux, de cagettes de fraises, de cochons, de thaïs.
Dans les portions les plus pentues des rampes en béton aux abords ravinés nécessitent une grande attention.
En milieu d'après-midi nous parvenons avec les réservoirs presque vides à atteindre un village. Une première station-essence est fermée. Angoisse.
Heureusement, plus loin, un cabanon attire mon attention. 3 fûts y sont alignés, surmontés de pompes à main fixées sur des bocaux gradués.
Nous donnons à boire à nos montures déjà bien sales.
La fatigue se lisant sur les visages de "mes" pilotes, je décide de prendre le goudron pour rejoindre Mae Chaem, notre ville étape.
Les 2 premiers hôtels dans lesquels nous nous rendons sont "fulls". Un troisième nous semble trop onéreux. Nous poussons jusqu'à un quatrième, assez miteux mais quasi vide. C'est assez logique.
Peu importe, nous ne sommes là que pour dormir. Et à 12 euros environ la hutte au toit pointu nous ne pouvons pas être trop exigeants. Les draps sont propres, des ventilateurs brassent l'air chaud et les douchettes crachent un filet d'eau tiède. Ça ira bien...
Nous nous donnons rendez-vous à 18h30 afin de filer vers le "centre-ville" pour le dîner.
Éric, un peu froissé après une chute - heureusement sans gravité - dans une portion de fesh-fesh où la visibilité avait été très diminuée par le passage d'un véhicule s'est assoupi.
Ron pianote sur son smartphone et Franck est déjà parti faire des achats.
La nuit tombe. Le restaurant situé à moins de 100m nous semble correct. Nous pourrons, de là, surveiller le retour de Franck afin de l'inviter à nous rejoindre.
Les plats qui nous sont servis sont excellents. Soupe de pâtes et poulet aux herbes aromatiques, poulet au lait de coco et son bol de riz, légumes frits... que du bon.
4 grandes bières Léo et le tour est joué.
20h. Les paupières se font lourdes, il est l'heure d'aller se coucher.
Mae Chaem / Mae Sariang
Il ne pleut jamais en janvier en Thaïlande... sauf aujourd'hui !
Argh ! C'est rageant. La trace du jour était prometteuse, presque exclusivement TT mais le terrible orage qui s'est abattu cette nuit à l'ouest de Mae Chaem et les trombes d'eau qui se déversent encore sur le secteur de Mae Sariang nous ont empêchés de mettre ne serait-ce qu'un crampon dans les pistes escarpées, terreuses et extrêmement glissantes.
Les chemins "dégueulent" sur les routes, rendant la circulation périlleuse.
La journée d'hier a laissé quelques autres traces également.
Certains pilotes, peu habitués à rouler longtemps et sous une chaleur assez forte ont eu un peu de mal à prendre la route ce matin.
Il faut dire que les 130 kilomètres de mauvais bitume que nous nous apprêtions à faire sous une pluie étonnamment fraîche en auraient refroidi plus d'un.
Une nouvelle fois j'ai demandé à chacun de me noter entre 1 et 10 son état de fatigue à l'issue de la première journée, en tenant compte à la fois des difficultés du terrain rencontrées, de la chaleur, de la longueur de l'étape. 8 a été la note la plus élevée.
Je devrai redoubler de vigilance, d'autant plus qu'Éric nous a déjà gratifié d'une belle chute heureusement sans gravité dans le fesh fesh, pulvérisant au passage le rétroviseur de sa moto. Lui aussi a fini l'étape un peu chiffonné, avec un bel hématome à l'épaule.
Mae Sariang regorge de curiosités architecturales et la vie commerçante y est trépidante, mais reste peu sonore. Une ville paisible, quoi.
Espérons que demain il fera meilleur...
Mae Sariang
Après avoir été trempés par le haut hier en raison des fortes pluies qui se sont abattues sur nous entre Mae Chaem et Mae Sariang, il fallait bien s'attendre à être mouillés par le bas aujourd'hui !
La journée qui ne comporte (sur le papier) que 108 kilomètres s'annonce tranquille et débute par l'incontournable passage à la pompe à essence.
Ensuite, nous prenons de la hauteur pour, 40 kilomètres plus loin plonger vers la Salawin River.
L'orage d'hier a causé de gros dégâts par ici. Un pont submersible a été... submergé. Les buses de béton qui devaient laisser passer le flux se sont bouchées et ont provoqué un chamboulement des rives.
Tout le village est à la manœuvre pour redonner un peu d'allure à l'édifice, sous l’œil attentif des officiels en uniformes crème et bleu nuit qui, smartphones en mains immortalisent l'événement.
Ça fera joli dans le rapport...
Les quelques kilomètres qui précèdent notre arrivée au bord de la rivière se font sur une route défoncée et pleine de terre.
Et c'est sans compter les buffles qui n'ont rien trouvé de mieux que de déambuler sur la chaussée, dans le brouillard.
Au village, nous prenons la direction du nord par une belle piste sinueuse. Un peu grasse par endroits, surtout à l'ombre des feuilles de bananiers. Elle nous mène jusqu'à un autre village, que nous atteignons vers midi.
Je fais le point. Nous avons mis près de 3 heures pour arriver jusque là. Il faut se rendre à l'évidence, le groupe n'a pas un niveau de maîtrise de la conduite sur piste suffisant pour que nous puissions envisager la remontée de la rivière sur plus de 40 kilomètres qui était prévue au programme.
Nous décidons de manger ici, puis de redescendre dans le premier village afin de tenter une escapade en "long boat" sur la Salawin River.
Un thaï à la bouche rougie par la chique et à l'esprit un peu parti nous indique un restaurant. Il est à quelques centaines de mètres.
Je fais monter le jeune sur ma moto et zou ! C'est parti.
Sympa, je le ramène chez lui une fois le groupe stationné devant le restaurant.
Sympa aussi, la cuisinière. Au menu : soupe thaï avec tofu et basilic, nouilles et jus avec des "yeux" dessus.
Une fois retournés dans le premier village, nous négocions une balade en bateau.
Nom, prénom, âge et sexe de chacun sont déclarés au douanier tiré à quatre épingles. Il est dans sa guérite, tellement haut perchée qu'il faut monter sur un banc pour atteindre le guichet où se trouve le cahier à spirale sur lequel nous devons nous identifier.
Les eaux sont chargées de limon, le courant est violent. La balade de plus d'une heure nous mène en aval, jusqu'à un canyon cerné par les grands arbres, accrochés aux rochers.
À bâbord, la Thaïlande et à tribord, le Myanmar. En remontant, ce sera l'inverse. Logique.
Une fois de retour, nous reprenons la mauvaise route goudronnée qui nous ramène à Mae Sariang.
Finalement, quelques bonnes flaques de boue collante, quelques gués significatifs, quelques grimpettes et descentes bien ravinées auront agréablement pimenté notre troisième étape.
Et quoi de mieux qu'une bonne balade digestive sur la Salawin River après un bon plat thaï dégusté, au calme, au fin fond de la forêt primaire ? Rien.
Mae Sariang - Mae Hong Son
Au réveil ce matin, tôt car l'étape fait plus de 300 kilomètres, il fait gris. Crachin breton, brouillard et petite fraîcheur ne vont cependant pas entamer notre excitation à l'idée de rouler.
Les quelques premières dizaines de kilomètres se déroulent et s'enroulent (terme motard) paisiblement. Les pistes sont larges, gravillonnées et peu vallonnées.
Ensuite, ça se corse un peu au fur et à mesure que nous prenons de l'altitude et que nous nous enfonçons dans la forêt, direction plein nord.
Les pluies des jours passés ont bien lubrifié la glaise de surface, "ça glissouille un max" !
Ron, peu habitué à ce genre de terrain aux USA va goûter la piste à 6 reprises en moins de 10 kilomètres. Lui et sa moto sont bien chargés de boue à présent. Il se fondent dans le paysage. Il n'y a guère que son visage, rouge tomate qui trahit sa présence. Chaud !
Nous prenons vite du retard sur le programme prévu pour cette étape marathon.
Les pistes s'enchaînent à un rythme... en fait sans rythme. Tout au plus roulons-nous à 15 kilomètres par heure de moyenne.
Les paysages sont magnifiques mais dès que nous levons le nez pour les admirer, nous partons à la faute. Les pauses, nombreuses, permettent cependant d'apprécier ce qui nous est offert par cette région, superbe.
Peu avant midi nous faisons une première coupe.
Nous retrouvons la route qui relie Mae Sariang à Mae Hong Son. Elle est très connue des motards car elle comporte pas moins de 1864 virages. Et le bitume est parfait. Donc plein gaz... forcément.
Un petit tour à la station-essence de campagne aux pompes automatiques avaleuses de billets de banques, un bon poulet grillé au feu de bois, à l'étouffé dans une immense jarre en terre cuite, une bonne rasade d'eau fraîche et hop ! C'est reparti.
Toujours plein nord, nous ne tardons pas à quitter à nouveau le goudron pour faire plaisir à nos motos.
Le ciel est bleu, les versants des montagnes orientés au sud ont séché. Mais ceux orientés au nord reste bien humides.
Quelques belles montées où il ne faut rien lâcher et quelques bonnes descentes où là, on aimerait bien tout lâcher et se sauver vont donner quelques sueurs froides à Éric, Franck et Ron. Surtout à Ron.
Curieusement, Ron semble mieux piloter lorsqu'il ouvre la marche. C'est bon à savoir.
Éric, lui, fiévreux depuis quelques jours a du mal à trouver son rythme et surtout se fatigue rapidement. Ajoutée à cela sa douleur à l'épaule depuis sa chute du premier jour de raid... Il n'est pas très en forme.
Franck me pose beaucoup de questions sur ma manière de piloter ici sur ce terrain. C'est volontiers que je lui donne quelques tuyaux.
En milieu d'après-midi, tous sont lessivés. Nous prenons la route pour terminer l'étape.
Mae Hong Son est une petite ville bien sympathique qu'il faut découvrir le soir à la nuit tombée. Les temples illuminés se reflètent dans un petit lac. Autour, des dizaines de commerçants s'affairent. Il y a la rue des vêtements et des babioles, et la rue des petits étalages de plats odorants.
On a envie de tout goûter !
Nous choisissons la terrasse d'un restaurant "en dur" pour dîner. Depuis l'étage, on domine les rues animées. Un haut-parleur crache de la musique thaï tandis que la sono de l'établissement où nous nous trouvons braille des tubes de chez nous, revisités à la sauce asiatique. Un bien curieux mélange.
Fin de soirée à 20h30. Au lit tout le monde !
Mae Hong Son - Pai
Tout avait si bien commencé...
Au départ de l'hôtel, tout le monde est en forme. La brosse à dents n'a pas été oubliée dans la salle de bain, le plein des machines est fait, les chaînes sont huilées, les consignes de prudence sont répétées.
Je roule derrière. Ron est juste devant moi. Il respecte scrupuleusement les conseils que je lui ai donnés : lire la piste afin de croiser les saignées pile entre 2 virages successifs, pour, chaque fois s'engager dans l'extérieur des courbes, là où le terrain est le moins raviné.
Et puis il y a eu cette descente, lisse et luisante de glaise humide.
À vitesse réduite pourtant, il perd l'avant de sa moto et va se vautrer dans le fossé.
Il se relève mais, au moment de redresser sa monture, il sent que son poignet droit a lâché.
Nous sommes à 50 kilomètres de la première route goudronnée, dans la montagne, au milieu de rien avec des bosquets pour seuls spectateurs.
Éric et Franck sont alors assez loin devant.
Je sors tout d'abord de quoi bander le poignet un peu en forme de "Z" du blessé. Je lui propose un comprimé anti-douleur qu'il s'empresse d'avaler.
Éric et Franck ont rebroussé chemin, le groupe est au complet.
Et maintenant, on fait quoi ?
Appeler les secours ne servirait à rien. Un pick-up mettrait des heures à parvenir jusqu'à nous et, comme Ron se sent bien, nous décidons d'effectuer des rotations afin de descendre dans la vallée alternativement les motos et le bonhomme.
Tandis que Franck descend la moto de Ron, moi je le transporte sur la mienne. Plus loin, nous laissons Ron et sa moto à l'ombre et je remonte Franck afin qu'il puisse reprendre sa moto.
Nous effectuons une première rotation de quelques kilomètres seulement car nous avons trouvé un hameau avec quelques locaux. C'est toujours mieux que dans la pampa.
La seconde rotation nous mènera jusqu'à un village, tout près de la route goudronnée.
À chaque rotation, Éric reste près de la moto de Franck.
Au final, il nous aura fallu 3 bonnes heures pour effectuer les 50 kilomètres de pistes. Sachant que Franck comme moi avons fait 3 fois la distance au total. Et moi, deux fois cette distance avec un passager. D'abord Ron, puis Franck.
Et nous ne sommes toujours pas à Pai !
Une dernière rotation est nécessaire.
Cette fois, nous laissons la moto de Franck sous la garde d'une restauratrice qui avait donné à manger à Ron durant la dernière rotation sur pistes.
Le plan est cette fois différent. Éric va accompagner Ron dans ses démarches, à l'hôpital, tandis que je ramènerai Franck à sa moto. Là encore, je ferai 3 fois la distance de 37 kilomètres.
Il est 18h15 lorsque tout le groupe se retrouve à l'hôpital.
Franck et moi allons chercher un hôtel tandis qu'Éric organise avec Ron le rapatriement de la moto chez le loueur et le transfert de Ron à Chiang Mai pour y être soigné par un orthopédiste.
Nous parvenons à aller dîner en ville avant son départ.
Le groupe n'est plus constitué que de trois pilotes à présent.
Demain, nous en saurons plus sur l'état de Ron.
Pai - Chiang Dao
Mauvaise nouvelle au réveil !
Ron croyait que son poignet n'était que déboîté, la radio n'ayant pas montré de cassure.
Mais l'orthopédiste de Chiang Mai y a vu une fracture.
Ron, qui pensait passer quelques jours à nous attendre à Chiang Mai doit être rapatrié à Los Angeles pour y être opéré !
Le pauvre, il aura fait 48 heures d'avion pour... 4 jours de moto !
Bon rétablissement à lui...
De notre côté, nous décidons de faire une journée sans tout-terrain afin de digérer celle d'hier.
Ça commence par un petit tour à l'hôpital pour Éric, qui doit se faire soigner sa blessure à l'épaule. Rien de grave mais le frottement de sa tenue sur une légère brûlure lui fait mal.
Il devra y revenir en début d'après-midi.
Du coup, ça conditionne notre emploi du temps.
Nous parvenons à laisser nos bagages en consigne dans notre hôtel, afin de nous rendre dans une belle grotte où Franck et Éric feront une balade en radeau de bambous.
Après avoir déjeuner sur place, nous retournons à l'hôpital, comme convenu.
14h30. Nous prenons enfin la direction de Chiang Dao que nous atteindrons à la nuit tombante.
Heureusement, j'y connais un hôtel sympa. Arrivés sur place, le propriétaire me reconnais.
J'avais fait étape ici en 2016 notamment et il avait pris en photo le groupe de l'époque.
19h30. Dîner.
20h30. Dodo.
Chiang Dao - Fang
Nous quittons à regret notre hôtel de cette nuit.
Hier soir, le dîner au restaurant était très sympa et nos bungalows en teck également.
Un brouillard épais recouvre Chiang Dao au moment de prendre la route.
Moins de 10 kilomètres après la sortie sud de la ville, nous piquons plein Est vers les montagnes.
Une première piste complètement défoncée, serpentant entre les plantations d'agrumes s'offre à nos roues. À plusieurs reprises je dois modifier notre itinéraire. Soit parce que la piste a été "déplacée", soit elle n'est plus praticable et alors il faut en "inventer" une nouvelle.
Cette fois, nous remonterons un cours d'eau sur quelques dizaines de mètres pour contourner un effondrement.
De longs rubans de béton ont encore "mangé" les plus belles pistes du secteur ! Rhaaaa...
Je l'avais constaté lors de mes précédents voyages.
Après un déjeuner "rustique", nous nous engageons dans une nouvelle piste, d'abord large et blonde. Très vite elle se resserre et prend une jolie teinte rouge.
Au bout d'une dizaine de kilomètres, elle se resserre encore et se transforme en un single. Le pilotage devient acrobatique et il est compliqué de retenir la masse conjuguée de la moto, des bagages et du pilote dans les descentes, vertigineuses et rainées par les passages répétés des cyclomotoristes locaux pour qui strictement rien n'est infranchissable. Quelle dextérité !
Le roulage aura été vraiment agréable dans cette forêt peu dense, où les bambous et les hévéas se disputent la vedette.
Nous sommes ensuite contraints de faire un demi-tour face à un portail métallique fermé, barrant la piste.
Une autre belle boucle tout-terrain nous attend. Un bout de route fait la jonction avec celle que nous terminons.
Toute aussi magnifique, mais moins technique, elle va nous "déposer" à 5 kilomètres à peine de notre hôtel de Fang.
Fang est une ville moche.
Une lessive pour Franck et moi, un nouveau pansement pour Éric dans l'hôpital de la ville, et nous voilà posés au bar.
Demain devrait être une autre belle et bonne journée de roulage. Il faut donc que nous prenions des forces. À table !
Fang / Chiang Rai
Une étape totalement réussie... enfin !
Bonne pioche pour notre hôtel de Fang. Accueil sympa, chambres correctes, situation idéale et, surtout, excellente cuisine.
Il faut dire que l'établissement est tenu de longue date par une même famille, "échappée" d'une tribu reculée avec laquelle l'hôtel joue à fond la carte de l'écotourisme.
Des clients sont invités à passer quelques nuitées dans ce village pour contribuer à le sortir intelligemment de son isolement et ce dernier procure à la cuisine de l'hôtel quantité de recettes et de produits locaux. Les plats que nous avons pu déguster en témoignent. Riz collant au sésame frit, patates fourrées à l'émincé de poulet et sa sauce aux herbes aromatiques et au basilic... Excellent !
Une adresse à retenir.
Ce matin au réveil, le brouillard est dense et voile nos masques de cross. En plus, il fait frisquet.
Quelques centaines de mètres sont parcourus que déjà, une première piste se présente.
Nous prenons plein Ouest pour vite percer les nuages. Nous traversons une forêt dense d'altitude (1530m). Elle est un refuge pour la famille royale qui y possède une propriété avec héliport de campagne.
Dans cette forêt également, se trouve une nurserie d'une grande variété d'essences d'arbres.
Nous replongeons bientôt dans la vallée. Il fait toujours bien froid sous le couvert nuageux.
Mais bientôt des pistes bien raides vont nous réchauffer.
Comme ce single d'anthologie, que même les locaux ont abandonné. Nous ouvrons à nouveau la voie. Mais pour combien de temps ? La nature aura vite fait de recouvrir nos traces.
Un super bon moment en tout cas.
Les kilomètres s'enchaînent, et la faim commence à se faire sentir. Surtout qu'il est déjà 13h30.
Un restaurant de bord de route, très bien tenu par un jeune couple aura notre préférence.
Nous y mangerons très bien là aussi, et pour seulement 145 baths pour 3, soit 3,90 euros, plats de pâtes thaïlandaises et petits légumes, émincé de poulet, sodas et un café compris. Une misère.
Nous reprenons la route, ou plutôt la piste. Et quelle piste ! 150 kilomètres de bonne terre rouge. Un régal.
Ce n'est qu'à 17h30 que nous arrivons à Chiang Rai. Là aussi, rien à voir mise à part une horloge dorée de 10m de hauteur environ, genre trophée de kermesse et érigée au milieu d'un carrefour, en plein centre-ville. Au changement d'heure, elle sonne et scintille aux couleurs de l'arc-en-ciel. Spécial...
Repas indien ce soir, pour changer. Cuisine excellente, encore une fois.
Voilà pour aujourd'hui.
Chiang Rai / Mae Salong
Ce soir nous serons en altitude (1500m environ), au cœur des plantations de thé bien connues de Mae Salong.
Les chinois ont mis la main sur toute la province. Restaurants, hôtels, commerces, plantations...
Ils ont amenés avec eux leur goût pour le kitsch et les objets sans valeur qui vont avec.
Les plantations de thé laissent place peu à peu à d'autres cultures sans doute plus rémunératrices mais tellement moins jolies. Maïs, fruits sous filets. Les défrichages et les brûlis sont très nombreux. Des arbres magnifiques sont coupés. Ah... ces chinois, rien ne les arrêtent !
La journée commence comme toutes les autres ou presque depuis le départ : brouillard et froid.
Mais ce matin, nous allons vite monter en température. En 2h30, nous n'allons faire que 30 kilomètres !
Les pistes sur lesquelles j'ai embarqué Éric et Franck les auront marqués. Plus technique, y'a pas.
Mais que c'était bon !
En fin de matinée nous achetons quelques bananes, au cas où nous serions un peu retardés dans notre progression.
Je vise un restaurant où j'ai mes habitudes, situé à mi-étape, juste à côté d'un pont suspendu que nous devrons traverser.
Sauf que rien ne se passe comme prévu. Un vilain chemin impraticable, à forte pente descendante et où un torrent s'est mis en tête de passer sans demander l'autorisation à la dernière mousson a ravagé les traces pour ne laisser place qu'à des crevasses. Impossible de passer.
Demi-tour.
Nous déjeunerons tout près de Chiang Rai, le long de la highway super moche et bruyante qui monte vers le Triangle d'Or et, plus loin vers la Chine.
La fin de l'étape va se faire par le bitume, malheureusement.
Mais quel pied nous aurons pris jusque-là !
Une fois n'est pas coutume, je me suis laissé tenter par l'achat pour 100 baths (2,70 euros) et sans négociation d'une guimbarde en bambou confectionnée à la ma machette et au couteau par ce vieil homme, tellement sympathique. Rien à voir avec les "chinoiseries" vendues dans les grandes villes.
Mae Salong / Chiang Rai
Une étape formidable !
Pour la première fois depuis notre départ de Chiang Mai, il fait beau et déjà chaud à notre réveil !
Pourtant je suis déjà passé 3 fois ici à Mae Salong et à chaque fois le temps était totalement bouché. On ne va pas s'en plaindre.
Direction plein Nord. Les versants encore à l'ombre nous réservent de bons serrages de fesses dans les descentes. Ça "glissouille à mort" !
Mais très vite l'évaporation de la rosée matinale rend les pistes moins techniques. Notre vitesse de progression peut faire un bon d'au moins... 5 km/h !
Un single bien costaud va nous réserver une bien mauvaise surprise. Le sentier a été délaissé à cause sans doute du bétonnage des pistes principales desservant les villages alentours. Il est devenu inutile et s'est à la longue bouché.
Du coup l'occasion m'est offerte de donner à Éric et à Franck une petite leçon de "retourné de moto" bien péchu. D'un côté le ravin, de l'autre le talus encombré de bambous enchevêtrés.
Puisque le single ne fait que quelques dizaines de centimètres de largeur, l'idée c'est de cabrer la moto en la faisant littéralement grimper le talus, profiter du court moment où elle se retrouve à la verticale pour ramener l'avant sur le sentier, dans le bon sens si possible et sans pour autant laisser filer l'arrière dans le précipice ! Pas simple.
L'opération est un peu violente mais ça marche.
Nous faisons un peu de route goudronnée pour reprendre notre souffle et pour récupérer le temps perdu.
Peu après déjeuner, nous faisons une courte halte au point le plus au Nord de la Thaïlande, à l'endroit même où se situe un poste frontière avec le Myanmar. La Chine se trouvant à une cinquantaine de kilomètres encore plus au Nord, il est le point de déferlante de produits "made in China". Le flux est incessant.
Nous longeons ensuite le Mekong jusqu'au repère à touristes qu'est le Triangle d'Or. De l'autre côté du fleuve se trouve le Laos.
Après une pause bistrot nous poursuivons notre chemin.
Nous en profitons pour prospecter quelques nouvelles pistes. Bonne pioche pour 2 bons morceaux de tout-terrain qui viendront pimenter mon prochain raid ici.
Direction plein Sud pour revenir à Chiang Rai, notre ville étape d'il y a 2 jours.
Même hôtel, même rue arpentée pour aller dîner, mêmes horaires. La routine.
Chiang Rai / Phrao
Épuisés !
Ils sont épuisés, ce soir, les participants du RAID THAÏ 2019.
Sur le papier pourtant, l'étape du jour semblait facile. Des "montagnettes", un début de journée passé à serpenter entre les rizières et les piscicultures, un p'tit restau sympa à midi...
Et puis ça s'est franchement corsé dès le début d'après-midi. Heureusement que nous avions pris des forces. Les 3 bananes avalées par chacun en fin de déjeuner auront vite été digérées. Et que dire des litres d'eau évacués par tous les pores de notre peau.
Il faut avouer que le single que j'avais dégoté s'est révélé très, très technique de l'avis de Franck et d'Éric.
À maintes reprises j'ai dû enfourcher leur moto pour les laisser souffler un peu et franchir pas mal de difficultés de terrain.
Au sortir de la forêt, nous prenons le temps d'un bon café.
Le plein d'essence et zou ! Un peu de bitume pour ventiler.
À environ 45 kilomètres de Phrao, nouvelle piste bien velue.
Au kilomètre 15, un bambou en travers du chemin indique que ma trace va devoir encore être modifiée. Sans doute un glissement de terrain...
À nouveau nous devons prendre une route goudronnée pour retrouver plus loin l'itinéraire que j'ai tracé.
Finalement, c'est à l'entrée de Phrao que la jonction se fait.
Nous nous rendons donc directement à l'hôtel. Un établissement très modeste, tenu par un couple âgé qui ne tarde pas à me reconnaître. Il faut dire que cela fait 3 fois que je viens ici, chez eux.
Il ne faut pas traîner pour aller dîner. À Phrao, tout est fermé à partir de 20h environ.
Un restaurant ne servant que des brochettes de viande, poisson, de saucisses et champignons fera l'affaire. Le tout arrosé de bonnes bières Léo. Mais c'est juste pour nous réhydrater après cette longue et belle étape.
Demain, retour à Chiang Mai et fin du circuit.
Phrao - Chiang Mai
Une fin de raid toute en douceur, avec quelques beaux tronçons de pistes et des vallées à la nature luxuriante.
Comme la plupart du temps, la dernière journée est écourtée ou modifiée par les participants. La peur de se faire mal, la fatigue accumulée, la crainte de la panne empêchant de restituer les motos dans les délais, l'envie d'une bonne douche et de quitter l'équipement de protection et les bottes... ?
Sûrement tout à la fois.
Une fois de plus, le brouillard est tenace. La veste n'est pas de trop, surtout que la trace transformée et essentiellement routière nous mène dans un premier temps en altitude. La route est belle et sinueuse.
Passé le massif nous redescendons en plaine. Une grande route nous rapproche de Chiang Mai. Elle est vilaine et droite mais un vrai café rendra la pause que nous décidons de faire tout de même agréable.
À une cinquantaine de kilomètres de la ville, nous tentons quelques pistes faciles. Elles sont superbes et serpentent en vallée. L'humidité de la nuit rend l'air plus lourd qu'à l'habitude. Autant dire que nos vestes ont été soigneusement rangées dans nos sacs.
Chiang Mai se profile à l'horizon, et les feux tricolores interminables également.
Nous nous rendons tout d'abord à l'hôtel pour y déposer nos sacs et, sans plus tarder nous allons rendre les motos.
Quelques pièces de carrosserie et quelques poignées et leviers abîmés nous sont facturés. À peine 20 euros pour l'ensemble.
Retour à l'hôtel en taxi type "Uber" climatisé, pour un prix inférieur de 2/3 à celui d'un tuk-tuk. 67 baths la course d'une demi-heure environ dans les bouchons. Soit moins de 2 euros !
Douche, lessive de la tenue "civile" pour ne pas sentir le buffle dans l'avion et hop ! Direction le centre-ville pour le restant de la journée. Le dîner se fera au Rider's Corner, comme au premier jour de raid.
Demain c'est journée libre et après-demain ce sera retour à la maison.
Un bien beau voyage.
Merci à Ron (le pauvre!), Éric et Franck.